« Hormis les problèmes de santé, plus le temps passe, plus je suis lourde, fatiguée, dans l’incapacité d’accomplir certaines choses, notamment avec les enfants.
Être obèse implique de m’adapter en permanence.
De m’interroger avant de faire quoi que ce soit : ≪ Cette chaise va-t-elle supporter mon poids ? ≫, ≪ Est-ce que je tiens sur ce trottoir ? ≫.
De devoir me garer plus loin, car la place de parking est trop étroite et que je ne pourrai pas m’extirper de mon automobile.
De pleurer en sortant des courses lorsque je découvre qu’une voiture est collée à la mienne et qu’il m’est impossible de m’y glisser. Car, obèse depuis l’enfance, je n’ai jamais eu le loisir de me faufiler.
D’avancer régulièrement l’heure du réveil, car il m’est de plus en plus compliqué de m’habiller. Le pompon revient aux chaussettes qui sont ma croix journalière.
De demander de l’aide aux collègues pour accéder aux archives, car je passe à peine une cuisse entre les rayonnages.
De prendre des antidouleurs quand je reçois des invités pour réussir à gérer le ménage, la préparation du repas et la visite sans m’écrouler.
Même s’il n’est pas reconnu en tant que tel, je ressens mon poids comme un réel handicap, qui me rend la vie difficile au quotidien. Et tout autour de moi me le rappelle constamment. Heureusement, j’ai un travail administratif et je n’ai pas à m’inquiéter à ce sujet, contrairement à d’autres obèses qui peuvent avoir du mal à trouver ou garder leur boulot s’il y a contact avec le public ou beaucoup de manutentions par exemple. Leur apparence ne rassure pas les employeurs potentiels (ce qui est discriminatoire, mais comment le prouver ?), ou les douleurs deviennent invalidantes et rendent certaines tâches difficilement réalisables. »